Journée de merde, c’est une journée de merde, que je le veuille ou pas. Je n’irai pas en cours, pas moyen, je ne peux pas y aller dans cet état, je risque d’infliger une clé au premier qui oserait me faire une remarque de travers. Je ne peux pas me rendre en cours, tant pis, je suis obligée de sécher. Ça ne me gêne pas plus que ça, mais j’aimerais pas à avoir à m’expliquer. « Pourquoi n’es-tu pas venue en cours ? » « Parce que je n’ai pas eu ma dose d’ecsta monsieur ». Ça le fait grave. Ça passerait nickel, et je me retrouverai à la rue. Trois fois rien quoi. Ça ne m’arrive pas souvent d’être en manque, mais j’ai des périodes comme ça, où j’en ai besoin. Malheureusement, je n’en ai pas sur moi. Pire, mon fournisseur est introuvable. Génial. Vaut mieux que j’aille faire un tour, ça me calmera peut-être…

Mains dans les poches de mon baggy trop large, je regarde devant moi, errant, essayant de calmer la migraine qui vient taper mes tempes. Je passe une main dans mes cheveux, et sur mon débardeur, dont j’ai l’impression qu’il me colle trop à la peau, et c’est le cas. Je regarde mon reflet dans une vitrine, j’ai l’air fraiche comme une rose, mais intérieurement je rage littéralement. Tiens, la salle d’arcade, n’y a-t-il pas des jeux où il faut tirer des paniers là dedans ? Je m’y rends, et oh surprise, Su Ji finit une partie de danse… Je ne l’avais pas vue depuis… Ce soir là… Je me rends au jeu que je cherchais, sans la quitter des yeux. C’est qui ce type qui est avec elle ? Sa tête me revient pas, voilà, au moins c’est dit. J’introduis une pièce dans la machine et six ballons sont à ma portée. Le jeu commence, je les mets tous, je les enchaîne, et pourtant, ce n’est même pas le panier que je regarde, mais bien elle, et son sourire. Bon sang, ce que ça m’agace… J’aimerais aller vers elle, mais je ne ferais que déranger, non ? Et puis ça fait quoi si je dérange ? Un bruit strident me sort de mes pensées, ah, j’ai battu le record de paniers.

Après avoir croisé son regard, je ne me sens pas plus apaisée. Au contraire, même si j'adorerais en être plus calme, c'est mort. Parce que je sais comment elle va réagir, parce que je sais que dans mon état, moi je vais me prendre la tête, mais pas elle. Tout comme pour ces paniers, elle va faire comme si c'était un jeu, n'est-ce pas? Sauf qu'aujourd'hui, je ne pense pas être capable de me tenir aux règles et de jouer, à mon tour. Elle s'avance vers moi, et du coup, je recule, je m'éloigne du panier, et de ces gens curieux qui me regardaient surpris. Elle a beau sourire, moi je n'y arrive pas, mon corps est bien trop stressé pour ça. Je ne suis pas d'humeur, vraiment pas, mais il faut que je fasse un semblant d'effort pour en cacher la cause...

- Autant que toi si je ne m'abuse...

Su Ji rit, tout près de moi, tout près de mon oreille. Cette mélodie qui d'habitude me plaît tant, m'agace presque, parce que je ne peux pas rire avec elle. Je suis dans un mauvais jour, c'est le moins que l'on puisse dire. Alors je m'assois à la première table qu'il y a et la regarde. Malgré tout, c'est dans mes bras que je voudrais la voir, et non pas face à moi entrain de rire ou se moquer, je ne sais pas, je ne suis pas en mesure de discerner les choses. Je pose mon portable et mon paquet de clopes sur la table, et je soupire. Même si je m'en grille une, cette sensation ne me quittera pas. Pourquoi mon dealer n'est pas joignable, merde!?

- C'était qui c'type?

Je parle d'une voix rauque à chaque fois, d'une voix lasse et loin d'être amicale. Il ne faut pas m'en vouloir, ce n'est pas comme si je me contrôlais totalement, là.